Un livre d’Alain Rivière et Jean Yves Jouannais :line-break-light

Fac-similé de la Collection Marboeuf :

La collection à sa naissance : Félicien Marbœuf écrit à Marcel Proust. Ce dernier lui répond et la collection s'enrichit de quatre lettres et d'un portrait inédit de Proust. Une collection à deux faces : en pages de gauche, cinquante portraits d’écrivains, les yeux fermés. Face à eux, en pages de droite, cinquante feuillets trouvés chez Marboeuf, vierges de toute littérature. Une collection de paupières, en somme.

Éditions Yellow Now & Anima Ludens
Sortie : mai 2014

Sortie : mai 2014

Préface de François de Coninck et Alain Rivière.

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QUE RESTE-T-IL DE CE BEAU POÈME QUE TU M’AS LU DERRIÈRE UN MEUBLE ?

L’ouvrage ainsi titré est un petit volume. Il tient dans la main et se glisse dans une poche. Un pan de vie : l’œuvre absente ou la littérature contournée de Félicien Marbœuf (1852-1924). Aucun appareil critique ne le surplombe ; c’est un fac-similé. On y trouve seulement l’empreinte laissée par Marbœuf, la poussière qu’il souleva en s’éloignant sur les chemins de la littérature.

Qu’y voit-on, alors ? Que serrait ainsi Félicien Marbœuf dans sa poche ?

Des images. Une collection d’images. Une collection à deux faces, semblable aux ailes du papillon que l’entomologiste pique soigneusement au fond d’une boite : sur les pages de gauche, cinquante portraits d’écrivains, les yeux fermés. Face à eux, en pages de droite, qu’ils ne peuvent pas voir : cinquante pages vierges, paperolles silencieuses, vierges de toute littérature.

Une collection de paupières en somme, ou “tout en paupières“, selon l’heureuse expression de Marbœuf dans une lettre à Marcel Proust.

Car il y eut bien une correspondance entre Marbœuf et l’auteur de la Recherche. Ici, deux lettres à Proust sont reproduites, et les réponses reçues de lui, qui nous parlent du moment d’origine de la collection. Elles sont très importantes. Marbœuf les a soigneusement conservées dans son cabinet ; le présent cabinet de poche à tranche rouge.
À y regarder de près, ce sont bien des tensions de l’histoire des lettres qui s’annoncent dans le personnage de Marbœuf. La littérature impossible, pensons à Melville, à Mallarmé, Borges, Blanchot, l’écriture blanche, l’absence, l’autobiographie impossible, la langue océanique et impersonnelle, face à l’océan bien réel, lui, obstiné, de l’œuvre proustienne. La littérature ou la vie, les mains en l’air. La guerre, en somme…

… Et le somme à la guerre, comme on le verra aussi en lisant cette correspondance.

Félicien Marbœuf est un nuage, un nuage de poussière à l’horizon d’un champ de bataille : la littérature.

Alain Rivière