Fulgur, le jardin des simples.
Un film d’Alain et Dominique Rivière.
Réaliser un film était un désir ancien. Nous y pensions chacun pour soi depuis longtemps, à la dérobée. À plusieurs reprises, depuis une vingtaine d’années, nous avons travaillé ensemble, mais toujours à autre chose.
Le cinéma, nous y pensions presque pour rire, comme à un pays chimérique, bien trop lointain, escarpé, séparé du possible. Nous voulions rester du côté des chasseurs-cueilleurs. Or le cinéma, comme le reste du monde, appartient aux éleveurs. Pourtant, nous le savions bien, il offrait le meilleur théâtre d’opération possible à certaines de nos visées.
Mais vraiment, nous n’avions pas la moindre envie de nous épuiser dans le labyrinthe de la production des films, carrefour de tous les pouvoirs où nous avions déjà vu se perdre tellement d’énergie autours de nous : l’écriture, les refus, la ré-écriture, le dressage du désir.
Il fallut donc substituer d’autres mots à ceux du cinéma. Des mots moins féeriques : pas un rond au lieu de production, démerde au lieu d’équipe technique, etc.
C’était faisable et couramment pratiqué dans le court métrage, mais beaucoup plus raide pour un long. Ce fut donc long.
Le cinéma, nous y pensions pour rire, et c’est bel et bien en riant que nous y sommes allés, finalement.
Le film dira lui-même ce qu’il en était de nos visées, mais nous savons désormais que c’était vrai : le cinéma est un pays escarpé et il n’est pas moins rude aux vagabonds qu’à quiconque.
Alain & Dominique Rivière.